13021223_LIEVREMONT+X1P1.jpg Yoann Maestri, à terre, et le Gallois George North, samedi 9 février au Stade de France. | GONZALO FUENTES/REUTERS

 

C'est la "magie du Tournoi", pourrait-on dire avec une bonne dose d'ironie, voire de cynisme. Les Italiens, fantastiques vainqueurs de la France à Rome, sont fessés-déculottés à Edimbourg (10-34) par des Ecossais eux-mêmes balayés en Angleterre (38-18) une semaine plus tôt. Nos Bleus, superbes vainqueurs en automne de l'Australie, sont une nouvelle fois battus (16-6), cette fois par des Gallois rouge pâle qui restaient sur huit défaites consécutives. Où est la logique ? Où dénicher un peu de rationnel ?

Seule l'Angleterre, vainqueur de ses deux premiers matchs et qui a tenu bon contre l'Irlande (12-6), assure une certaine continuité. Mais pour respecter jusqu'au bout cette logique de l'absurde, les Français n'ont-ils pas des raisons d'y croire, samedi 23 mars à Twickenham ? Jusqu'ici, sa longue histoire en atteste : après une belle gifle, le XV de France a toujours su réagir avec orgueil.

Encore un exemple récent, il y a deux ans, après notre première défaite dans le Tournoi face aux Italiens (21-22). Nous avions infligé un 28-9 aux Gallois. Mais c'est l'un des paradoxes du match de samedi : la semaine, en termes de préparation, a été bien meilleure que celle qui a précédé le déplacement à Rome. Pourtant, au Stade de France, on a vite compris.

LES SIFFLETS SONT INJUSTES

L'esprit de révolte et la colère semblaient avoir généré de la frustration. Et sécrété le venin du doute qui paralyse les jambes et neutralise les neurones. France-Galles s'est résumé à un match de boxe sans prise de risques, au jeu restrictif, nécrosé, avec beaucoup de stress, d'inhibitions et du doute. Les Français ont donné l'impression de gamberger dès l'entame. Ils ont été courageux mais approximatifs et fébriles. A l'heure de jeu, les Gallois, qui étaient venus pour ne pas perdre, se sont dit qu'il y avait un coup à jouer et ont mieux maîtrisé la seconde mi-temps, avec davantage de fluidité, d'ambitions, avant de trouver la faille pour inscrire le seul essai de la rencontre.

Les sifflets du stade font mal. Ils sont cruels et injustes. Les gars ont été courageux et solidaires. Ce sont les mêmes qui, à l'automne, avaient quitté l'arène dyonisienne sous les vivats de la foule. Là aussi, où est la logique ? Me reviennent en mémoire ses quelques mots de Rudyard Kipling : "Si tu peux rencontrer triomphe après défaite et recevoir d'un même front ces deux menteurs, si tu peux conserver ton courage et ta tête quand tous les autres les perdront"... La seule bonne nouvelle pour le sélectionneur Philippe Saint-André : les joueurs qui affronteront l'Angleterre ne joueront pas en Top 14 le week-end prochain. Pour nos Bleus, cramés physiquement, c'est salvateur.

Je comprends la frustration du staff. Dès dimanche matin, leurs internationaux sont retournés dans leurs clubs. Philippe Saint-André, Yannick Bru et Patrice Lagisquet restent seuls à Marcoussis, à revisionner les matches, sans pouvoir travailler dans la continuité avec les joueurs. Pendant ce temps, les Anglais, confiants, ont commencé à préparer le "Crunch" dès dimanche soir. Certains entraîneurs "à l'ancienne" résumaient les ingrédients qu'il faudra mettre dans un tel choc par la règle des trois C : du coeur, de la cervelle et des c..., mais aussi courage, cohésion et conviction en attendant des certitudes. Après tout, l'important, c'est la rose.

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